Cette prise de position présente les revendication du CCRE vis-à-vis de la Convention; elle a été adoptée par le Bureau exécutif de Barcelone, le 16 juillet 2002.

1. Le Conseil des Communes et Régions d’Europe (CCRE) fédère 42 associations nationales de gouvernements territoriaux dans 30 pays européens. Nos associations membres représentent ainsi 100 000 collectivités locales et régionales. Le CCRE a, pendant plus de cinquante ans, agi en faveur d ’une Europe politiquement intégrée, reposant sur de solides institutions communes, et a toujours promu le rôle des collectivités locales et régionales dans ces processus. Les collectivités territoriales constituent en effet les racines de la démocratie tant européenne que nationale. Le CCRE salue la décision de mettre en place la Convention et soutient la perspective visant à établir un cadre constitutionnel pour l ’Union européenne.

2. Le CCRE s’honore de la désignation de son Président, M. Valéry Giscard d ’Estaing, à la tête de la Convention. Nous avons, au mois de mars à Valencia, organisé un premier débat qui a abouti à de premières prises de position politiques liées aux travaux de la Convention. Ce document résulte des nouvelles réflexions de nos membres unis dans une vision d ’une Union européenne forte, démocratique, transparente et efficace. En bref, nous pensons que le moment est venu pour l’Union de reposer sur une base constitutionnelle compréhensible par nos concitoyens, proche d ’eux et ressentie comme pouvant prendre en compte leurs intérêts.

3. Nous tenons tout d ’abord à attirer l ’attention sur le fait que le tout premier article du Traité sur l ’Union européenne proclame que nous créons
« une Union sans cesse plus étroite entre les peuples de l ’Europe, dans laquelle les décisions sont prises le plus près possible des citoyens ».
Nous pensons que le moment est venu pour que l ’engagement visant à rapprocher l ’Union des citoyens repose sur de plus solides bases. Cette question figure par ailleurs dans la Déclaration de Laeken.

LE CONTEXTE

4. Dans le monde actuel, complexe et très mobile, de nouvelles formes de gouvernement et de gouvernance sont nécessaires afin de relever les défis auxquels sont confrontés nos citoyens et nos sociétés. Il n ’existe pas de dossier majeur qui puisse être résolu de façon satisfaisante par un seul niveau, ou sphère, de gouvernement. Bien au contraire, il est indispensable de mettre en place un système de gouvernance cohérent et intégré, au niveau européen et au niveau local. Si l ’on considère les problèmes liés à la création d ’emplois, à l ’inclusion sociale, à la politique urbaine, au développement rural, aux migrations ou à l ’environnement, il est évident que les solutions efficaces à chacune de ces questions requièrent un partenariat actif entre les différents niveaux de gouvernement.

5. Ce constat a d ’ailleurs été établi par le Livre Blanc de la Commission sur la gouvernance européenne, en 2001, qui souligne que la légitimité de l ’Union
« dépend aujourd ’hui de l ’implication et de la participation. Cela signifie que le modèle linéaire de mise en œuvre des politiques depuis le sommet doit être remplacé par un cercle vertueux fondé sur les retours, les réseaux et l ’implication, depuis la formation des politiques jusqu'à leur mise en œuvre à tous les niveaux. »
Cette référence à « tous les niveaux » comprend bien sûr les quatre niveaux, européen, national, régional et local. Tous jouent en effet un rôle essentiel dans la gouvernance et dans le gouvernement de l ’Europe.

6. L ’Union européenne peut être créditée de succès essentiels. Elle s ’est révélée être un facteur de paix - dans le cadre de ses frontières et dans sa politique extérieure , un facteur de démocratie, de prospérité croissante et de progrès social. Cependant, afin de préserver et de développer ces avantages et de promouvoir ses valeurs fondamentales, l ’Union doit évoluer vers une nouvelle étape. Le Traité de Nice a apporté la démonstration des limites de la méthode antérieure de modification des Traités, marquée par des procédures très complexes qui tendent à privilégier les intérêts catégoriels. Nous sommes à la veille d ’un processus majeur d ’élargissement qui offre une opportunité de sceller nos valeurs dans un cadre continental plus vaste. L ’Europe exige une vision renforcée ainsi qu ’une structure politique efficace afin d ’assurer ses succès et son rayonnement.

7. De plus, de récents événements ont souligné la nécessité qui figurait déjà dans la Déclaration de Laeken, et qui a conduit à la mise en place de la Convention, de réduire le fossé entre l ’Union et de nombreux citoyens. L ’un des moyens permettant de réduire ce fossé est d ’assurer que l ’Union de demain sera fondée sur le principe de subsidiarité et inclura le rôle des collectivités territoriales comme élément essentiel de ce processus.

8. En bref, l ’Union doit être dotée d ’un cadre constitutionnel adapté, qui soit intelligible et transparent, plus proche des citoyens, fondé sur des principes de base (comprenant la démocratie et la subsidiarité) et qui est attaché au travail en partenariat.

L ’UNION EUROPEENNE DE DEMAIN - OBJECTIFS ET PRINCIPES

9. Nous proposons que le texte fondateur de la nouvelle Union européenne - relativement bref - fixe ses missions et ses objectifs, ses principes fondamentaux, ses compétences et ses institutions. Les questions plus détaillées devraient figurer dans une seconde partie qui pourrait plus facilement être amendée que la première partie.

10. Dans une première étape vers la transparence et la simplicité, nous recommandons que l ’actuelle distinction entre l ’Union européenne et la Communauté européenne (avec des Traités et des objectifs séparés) soit abolie. Nous proposons une seule Union européenne - avec un seul Traité ou texte constitutionnel - dotée de la personnalité juridique. Cela n ’empêchera pas l ’existence de piliers distincts pour des types spécifiques de sujets ou d ’actions. Nous tenons cependant à rappeler que, selon nous, et dans la mesure du possible, l ’actuelle méthode communautaire devrait demeurer l ’instrument privilégié du processus de décision et d ’action de l ’Union.

11. Nous considérons que la Charte de l ’Union européenne sur les Droits fondamentaux devrait être intégrée, dès le début du nouveau Traité constitutionnel pour l ’Union. Cela exprimera l ’engagement de l ’Union et des Etats membres en faveur des droits établis par la Charte et renforcera le concept et le contenu de la citoyenneté européenne. Nous considérons cependant que les droits économiques et sociaux fixés par la Charte ne devraient pas conduire à l ’instauration de nouvelles charges financières pour les collectivités locales et régionales, à l ’exception des cas où, après consultation, leur financement serait pleinement prévu.

12. Nous pensons que les objectifs de l ’Union doivent être précisés de façon claire et synthétique. La plupart des objectifs fondamentaux figurent dans l ’article 2 du Traité sur l ’Union européenne, et ils se confondent de façon très large avec les « t ches » de la Communauté européenne ainsi qu ’elles apparaissent dans l ’article 2 du Traité établissant la Communauté. La rédaction de ces objectifs devrait cependant être simplifiée. Nous soulignons que la cohésion économique et sociale devrait demeurer l ’un des objectifs clés. De même, nous pensons que le maintien du rôle des services publics stratégiques devrait être inclus parmi ces objectifs (développant ainsi le concept des services d ’intérêt général et économique). L ’Union ne doit pas simplement être une union économique, mais doit également permettre - en application du principe global du développement durable - d ’intégrer les dimensions économique, sociale et environnementale. Nous proposons également que l ’un des objectifs soit la promotion des jumelages et des échanges d ’expériences entre la société civile et toutes les sphères de gouvernement en tant que moyens permettant de développer une meilleure compréhension et solidarité au sein de l ’Union.

13. Nous recommandons l ’intégration dans le nouveau texte de deux sortes de principes. Le premier est relatif à ce que nous appelons les principes fondateurs de l ’Union, reposant sur ceux qui sont actuellement déterminés par l ’article 6 du Traité sur l ’Union européenne et qui sont actuellement : la liberté, la démocratie, le respect des droits de l ’Homme et des libertés fondamentales, l ’état de droit, qui sont des principes « communs à tous les Etats membres ».

14. Nous proposons que cette liste soit plus approfondie, notamment afin de préciser plus clairement le champ de la démocratie. La pratique démocratique doit être améliorée dans les procédures mêmes de l ’Union européenne, et nous devons souligner que la démocratie locale et, le cas échéant, régionale, constituent des éléments essentiels de la démocratie à côté de la démocratie nationale.

15. Nous proposons en particulier que le principe de la démocratie locale soit consacré dans le cadre de l ’engagement de l ’Union en faveur de la démocratie. Cela pourrait être réalisé par le biais d ’une référence et d ’un engagement spécifiques au principe de la Charte du Conseil de l ’Europe sur l ’autonomie locale de 1985, signée par tous les Etats membres et par les pays candidats, et ratifiée par la plupart d ’entre eux. Cela pourrait être considéré comme un des éléments de l ’acquis communautaire. Nous pensons que l ’intégration d ’un engagement spécifique en faveur du principe de la démocratie locale permettra de s ’assurer que toute tentative d ’un Etat membre visant à abolir la démocratie locale constituerait une atteinte aux principes fondateurs, et permettrait ainsi à l ’Union d ’engager des mesures appropriées. Ce qui n ’est pas, à l ’évidence, le cas à l ’heure actuelle.

16. Dans ce contexte, nous recommandons également que l ’actuelle référence (figurant dans l ’article 6 du TUE) au respect par l ’Union des identités de ses Etats membres devrait comporter une référence aux « Etats membres, comprenant - dans le respect de leur organisation interne - leurs régions et leurs municipalités » ou une formulation similaire.

17. En plus de ces principes fondateurs de l ’Union, qui fixent les valeurs clés, nous pensons également qu ’il est nécessaire de préciser ce que nous appelons les principes de gouvernance, qui sont des principes opérationnels. Nous considérons que la Commission a beaucoup progressé en les précisant par le biais du Livre Blanc sur la gouvernance européenne. La liste proposée par la Commission comprend l ’ouverture, la participation, la responsabilité, ainsi que la subsidiarité et la proportionnalité.
Nous suggérons trois autres principes de gouvernance :
• la proximité (c ’est-à-dire la proximité aux citoyens),
• la consultation,
• le partenariat.
Nous considérons que la consultation de nos associations européennes et nationales au stade de la formation des politiques est d ’une importance particulière lorsqu ’une nouvelle législation qui affecte nos principales responsabilités est définie.

18 Ces principes de gouvernance sont d ’une importance particulière pour assurer qu ’à l ’avenir, l ’Union travaille en privilégiant le partenariat entre niveaux, ou sphères, multiples. Un tel partenariat suppose que les contributions des gouvernements locaux, régionaux, nationaux et européens soient intégrées et perçues comme un système global dont l ’objectif est le développement et l ’élaboration de meilleures politiques pour les citoyens. Nous considérons que ces principes de gouvernance permettent, en grande partie, de fixer des standards et des bonnes pratiques sans pour autant constituer d ’éléments juridiques. Les principales exceptions sont la subsidiarité et la proportionnalité, qui sont d ’une grande importance pour nous et sur lesquelles nous reviendrons au paragraphe 26.

LES COMPETENCES DE L ’UNION

19. La plupart des « compétences » de l ’Union européenne et de la Communauté sont aujourd ’hui partagées. Nous pensons que cela continuera et devrait continuer à être le cas à l ’avenir pour des raisons développées à la suite ; Il est tout d ’abord nécessaire de préciser que l ’UE et la CE ne disposent pas aujourd ’hui de ce que l ’on pourrait appeler des compétences, mais plutôt en grande partie ce qui est décrit comme des « activités » par l ’article 3 du Traité sur la Communauté européenne. La liste de ces activités précisées par cet article utilise un langage très varié et reflète le développement « géologique » de la Communauté à travers les différents Traités. De plus, les Traités actuels ne sont pas, tels qu ’ils sont rédigés, transparents, notamment en ce qui concerne l ’attribution des pouvoirs législatifs.

20. Nous considérons qu ’une Union fondée sur la démocratie et l ’état de droit exige une claire définition de ses compétences. Si un organe gouvernemental est appelé à adopter des lois, il est indispensable que les citoyens sachent à quels domaines s ’applique ce pouvoir législatif. Les Etats fédéraux ont adopté des réponses différentes au problème de la répartition des compétences, alternant selon plusieurs modalités entre le souci de la certitude et la nécessité d ’une flexibilité pour l ’avenir. La Loi fondamentale allemande constitue un exemple d ’une répartition détaillée des compétences ; d ’un autre côté, la Constitution des Etats-Unis représente un exemple d ’un Etat fédéral comprenant peu de compétences clairement attribuées.

21. Nous recommandons que l ’Union dispose d ’une liste claire de compétences définies par thème et exprimées en termes généraux. Cela permettrait un équilibre entre la certitude et la flexibilité. Nous pourrions par exemple envisager une Union dotée de compétences telles que « la politique environnementale » ou « la cohésion économique et sociale ». Il ne nous semble pas possible à ce stade d ’essayer de définir les compétences des Etats membres - ils seraient dotés des pouvoirs de légiférer et d ’agir dans les domaines non couverts par les compétences de l ’Union.

22. Il y a selon nous trois sortes de compétences. Tout d ’abord, les compétences exclusives de l ’Union qui sont très limitées à l ’heure actuelle. Elles incluent la politique douanière et commerciale, la politique monétaire pour l ’eurozone, et la base juridique du marché intérieur. Certains de nos membres souhaiteraient voir développer ce champ des compétences exclusives, par exemple dans le domaine des affaires étrangères. Par ailleurs, il existe les compétences primaires partagées où il est reconnu que l ’Union donne l ’orientation en termes de politique et de législation, mais où les Etats membres (et leurs collectivités territoriales le cas échéant) ont le pouvoir de légiférer et d ’agir dans la mesure où ils ne contredisent pas la politique ou la législation européenne de base. Enfin, il existe les compétences complémentaires partagées, où le rôle premier demeure celui des Etats membres, mais où il est reconnu que l ’Union a un rôle de soutien à jouer, par exemple en finançant des programmes ou projets pilotes ou par le biais d ’une coordination active.

23. Dans le cadre de cette division en trois types de compétences, le texte constitutionnel devrait fixer les compétences figurant dans chaque catégorie et les pouvoirs dont l ’Union dispose en relation avec chaque compétence. Dispose-t-elle du pouvoir de légiférer ? Dispose-t-elle du pouvoir de dépenser et de coordonner ? Lorsqu ’une compétence implique le pouvoir de légiférer, cela inclut-il le pouvoir réglementaire avec des dispositions, éventuellement détaillées, directement applicables ? Ou cela implique-t-il le pouvoir d ’adopter des directives cadres fixant les objectifs de la législation, tout en laissant aux Etats membres (et leurs gouvernements infranationaux) la mise en œuvre, prenant ainsi mieux en compte les circonstances et les traditions locales ? Le CCRE est favorable, à chaque fois que cela sera possible, au recours aux directives cadres (voir paragraphe 29 ci-dessous).

24. Dans tous les cas, les décisions ou actions de l ’Union qui ont des conséquences financières pour les collectivités locales et régionales devraient être mises en œuvre uniquement après définition et garantie des moyens financiers adéquats. Le principe selon lequel de nouvelles t ches et obligations doivent être clairement financées constitue une disposition très importante pour nous, compte tenu du fait que les collectivités territoriales mettent en œuvre une grande partie de la législation européenne, et devrait donc figurer dans le Traité lui-même.

25. Tout en étant convaincu de la nécessité de fixer des compétences spécifiques, nous reconnaissons que, au fil des années, l ’Union doit pouvoir évoluer et prendre en compte de nouvelles problématiques. Nous proposons donc que l ’Union soit dotée du pouvoir d ’ajouter de nouvelles compétences - comme c ’est le cas actuellement (article 308) -, mais uniquement dans l ’hypothèse où les deux organes législateurs (le Conseil et le Parlement) y sont favorables, par exemple par l ’expression d ’une majorité renforcée. Nous proposons que la Cour européenne de Justice soit dotée du pouvoir de déterminer si les autres institutions de l ’Union agissent au-delà de leurs compétences, et dans cette hypothèse, de pouvoir annuler ces actes.

26. De ce qui précède, il découle que nous considérons le thème des compétences comme étant non seulement une question législative, mais également relatif à tout pouvoir légal d ’agir. En ce sens, les collectivités territoriales de toutes sortes disposent d ’importantes compétences, certaines régions en Europe ont la compétence législative, d ’autres non. La législation est un moyen d ’agir dans le domaine public, elle n ’est cependant pas le seul ni toujours le plus important. Dès lors, dans beaucoup de politiques de l ’Union tels que les transports, l ’emploi, la politique rurale, l ’environnement, les affaires sociales etc., les collectivités locales et régionales ont toutes un rôle important à jouer dans le cadre d ’un système cohérent et intégré de gouvernance. Ce point est vital lorsque l ’on aborde la question de la subsidiarité.

SUBSIDIARITE ET PROPORTIONNALITE

27. Dans l ’introduction de ce document, nous évoquons l ’article 1 du Traité sur l ’Union européenne avec ses références aux décisions prises le plus près possible des citoyens. Les Traités ne définissent pas aujourd ’hui des moyens articulés permettant une mise en œuvre de cette disposition. Elle doit cependant être maintenue dans le nouveau texte constitutionnel.

28. Le principe de subsidiarité constitue le moyen évident et logique de mettre en pratique l ’article 1. Les Traités limitent actuellement l ’application du principe aux relations entre l ’Union et les Etats membres, mais le principe de subsidiarité constitue en vérité un principe d ’organisation qui s ’applique à toutes les sphères de gouvernement. En effet, la subsidiarité signifie que les décisions et les actions devraient être prises par la sphère de gouvernement la plus proche du citoyen, dans le sens de l ’efficacité. Dans de nombreux cas, les gouvernements locaux et régionaux constituent la sphère de gouvernement appropriée.

29. Les collectivités locales et régionales sont aujourd ’hui confrontées à une législation excessivement détaillée émanant de l ’Union européenne (mais également, il faut le reconnaître, des législations nationales). Les principes de la subsidiarité et de la proportionnalité devraient donc conduire l ’Union européenne à se concentrer sur les directives cadres plutôt que de développer des réglementations détaillées. Cela s ’inscrirait dans le respect du rôle et de la diversité des acteurs nationaux et régionaux et permettrait aux collectivités locales et régionales d ’adapter les objectifs de la législation européenne à leurs contextes et besoins respectifs. Le recours aux réglementations détaillées devrait être limité au strict minimum, et notamment lorsqu ’il y a une nécessité de règles européennes uniformes, par exemple en ce qui concerne le marché unique.

30. Dans un système comportant de nombreuses compétences partagées, il demeure nécessaire de connaître qui peut faire quoi. Prenons l ’environnement en tant qu ’exemple. L ’Union a un rôle pour légiférer dans les domaines où il existe un intérêt européen évident. Les gouvernements nationaux peuvent légiférer ou adopter leurs propres politiques dans les domaines qui ne sont pas en contradiction avec les lois européennes. Les gouvernements locaux et régionaux agissent dans leurs propres domaines, par exemple par le biais de l ’Agenda Local 21. Le principe de subsidiarité accompagné par celui de la proportionnalité déterminera « qui fait quoi ».

31. Nous reconnaissons qu ’une Constitution pour l ’Union doit définir les principes qui sont communs à l ’Union et aux Etats membres. La subsidiarité constitue l ’un de ces principes. Mais les textes fondamentaux ne devraient pas rechercher à forcer les Etats membres à ordonner d ’une façon particulière leur administration interne des collectivités locales et régionales.

32. De même, nous pensons qu ’il est essentiel que le nouveau texte constitutionnel définisse la subsidiarité de façon inclusive, comprenant les gouvernements locaux et régionaux, ainsi que les gouvernements européens et nationaux. Cela est nécessaire pour réaffirmer les principes de l ’autonomie locale et régionale s ’inspirant des principes de la Charte européenne de l ’autonomie locale, universellement acceptée. Nous sommes disposés à proposer la rédaction d ’argumentaires permettant d ’aboutir à ce résultat, des exemples d ’amendements possibles étant annexés à ce document. Nous proposons en particulier que l ’actuel article 5 soit amendé afin d ’intégrer une référence spécifique aux collectivités locales et régionales. Il est nécessaire d ’établir un mécanisme (juridique ou politique) permettant de vérifier l ’application de ce principe comme entre l ’Union et les Etats membres - voir paragraphe suivant. Nous proposons qu ’au sein de chaque Etat membre soit institué un mécanisme permettant de suivre l ’application du principe de subsidiarité dans son application au sein de l ’Etat. L ’Union devrait affirmer qu ’un tel mécanisme doit exister en pratique, mais ne devrait pas intervenir dans son fonctionnement.

33. Nous ne disposons pas d ’une position unie sur le fait de savoir si le contrôle du respect du principe de subsidiarité, lorsqu ’il concerne l ’Union européenne, devrait être assuré par des mécanismes légaux (recours auprès de la Cour européenne de Justice) ou par le biais d ’un mécanisme politique. Si l ’aspect « légal » comporte des avantages, il risque cependant de donner trop de pouvoir aux juges et aux avocats, au détriment des acteurs décisionnaires démocratiques. Si l ’aspect politique est privilégié, nous suggérons la mise en place d ’une Commission de la Subsidiarité qui devrait comprendre des représentants désignés par les collectivités territoriales ainsi qu ’issus des institutions de l ’Union et des parlements nationaux. Nous pensons que les dispositions fixées dans le protocole sur la subsidiarité et la proportionnalité demeurent valables et pourraient être adaptées pour une application infranationale.

LES INSTITUTIONS DE L ’UNION

34. Le CCRE demeure attaché à l ’application de la méthode communautaire dans la plus large mesure possible. Nous considérons qu ’il est cependant essentiel de ne pas contourner le Parlement sur les questions importantes. Les domaines concernés par les méthodes de coordination ouverte doivent se fonder sur les textes constitutionnels, et doivent être soumis au contrôle parlementaire dans la mesure où des décisions fermes sont en jeu. Nous sommes également convaincus que les collectivités territoriales doivent être pleinement impliqués dans les processus de la coordination ouverte lorsque nos compétences essentielles sont concernées.

35. En ce qui concerne la législation, nous proposons que la codécision entre le Parlement et le Conseil devienne la norme. Cela est à la fois plus simple à comprendre et plus démocratique dans le principe. Selon nous, l ’organisation actuelle des institutions prévoit deux chambres « législatives », le Parlement et le Conseil, et ne reconnaît donc pas la nécessité d ’une autre « chambre ». D ’un autre côté, nous considérons qu ’il est essentiel, en termes d ’ouverture et de démocratie, que lorsque le Conseil légifère, il agisse ouvertement et publiquement, conformant ses procédures à celles des législatures nationales ou fédérales.

36. Nous reconnaissons la nécessité pour l ’Union de disposer, notamment sur la scène internationale, d ’une forte identité et présence. Cela est partiellement une question de compétences, mais est également lié à la façon dont le Conseil Européen travaille. Nous considérons qu ’il est dangereux de conférer au Conseil Européen de nouveaux et importants pouvoirs exécutifs qui ne soient pas soumis à un contrôle démocratique par le biais des institutions de l ’Union. Dans le cas contraire, nous pensons que la déconnexion entre « les élites dirigeantes » de l ’Union et les peuples s ’élargira plus encore.

37. Nous réaffirmons notre conviction en l ’importance du rôle du Comité des Régions dans le cadre de l ’Union en ce qu ’il représente le gouvernement local et régional dans le processus formel de prise de décision. Nous proposons que le Comité soit reconnu comme une institution de l ’Union afin de souligner l ’importance du rôle de nos sphères de gouvernement dans la gouvernance de l ’Europe. Nous notons que le titre complet du Comité comporte tant les organes locaux que régionaux et considérons que cela est essentiel pour l ’avenir. A l ’heure actuelle, les délégations de quelques pays comportent une faible, voire aucune, représentation des collectivités locales. Nous proposons qu ’il y ait une obligation visant à assurer une représentation équitable, au sein de chaque délégation nationale, entre les collectivités locales et régionales.

LES POLITIQUES DE L ’UNION

38. Nous avons, dans des parties antérieures, regardé la question des compétences selon une perspective formelle - quelles sont-elles ? de quels pouvoirs disposent-elles ?. Nous ne les avons pas considérées du point de vue de la substance. Nous n ’envisageons pas d ’entrer dans les détails à ce stade, mais tenons à préciser quelques points.

39. Ainsi que nous l ’avons précisé dans les objectifs, nous pensons que la cohésion économique, sociale, territoriale et la politique régionale en général, demeurent des questions importantes pour l ’Union. Il s ’agit de domaines clés où l ’Union démontre sa solidarité et son engagement à réduire les inégalités structurelles. Nous nous opposons donc à toute tentative visant à « renationaliser » ces compétences.

40. Nous croyons également que la référence dans l ’article 158 aux secteurs ruraux doit être équilibrée par une référence aux secteurs urbains. La majeure partie de la population de l ’Union vit, et vivra, dans des zones urbaines, et l ’Union doit être en mesure d ’intervenir de façon stratégique pour relever les défis des inégalités urbaines et rurales.

41. De plus, en ce qui concerne les politiques agricoles et rurales, nous sommes particulièrement favorables à une approche politique qui privilégie le développement à l ’apport sans limites de subventions aux produits. Nous espérons que cette modification de perspective sera adoptée.

42. En cohérence avec notre proposition visant à ce que les jumelages et les échanges d ’expériences soient inclus dans les objectifs de l ’Union, de plein droit, nous estimons nécessaire qu ’une compétence expresse (bien que non législative) permette à l ’Union de promouvoir et de financer de telles activités. Cette possibilité ne devrait pas se limiter aux seuls échanges au sein de l ’Union, mais devrait également inclure les jumelages et les échanges avec les partenaires d ’autres, lorsque c ’est dans l ’intérêt de l ’Union.

LES RELATIONS ENTRE LES COLLECTIVITES LOCALES ET REGIONALES ET LA SOCIETE CIVILE

43. La Convention considère, à ce stade, les collectivités locales et régionales comme entrant dans la catégorie de la société civile. Nous souhaitons souligner que nos sphères de gouvernement sont par définition gouvernementales, et non pas non gouvernementales. Pour l ’avenir, nous insistons pour que la Convention considère les collectivités locales et régionales de façon conceptuellement séparées de la société civile. Toutes les sphères de gouvernement doivent étroitement travailler avec la société civile - il s ’agit là de l ’une des clés permettant de rapprocher l ’Union de ses citoyens. Les collectivités locales et régionales disposent d ’une grande expérience dans le domaine du partenariat avec les communautés locales et leurs organisations, expérience qui peut être utile à l ’Union dans l ’avenir

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